Ouille ça pique, les horaires… voilà bien un sujet épineux au cœur d'incompréhensions – ou de conflits- entre les jeunes et les entreprises. D’un côté, il y a des jeunes qui ont besoin de souplesse et de liberté pour gérer leur rythme de travail ; et de l'autre des entreprises qui redoutent des prises de libertés excessives. Comment concilier ces attentes parfois contradictoires ?
Pour le jeune qui arrive en entreprise, les horaires restent un grand mystère. Les questions sont nombreuses : L’entreprise a-t-elle des règles strictes ? Quelles sont les habitudes des collègues ; les horaires sont-ils différents selon le poste, le statut ? Que se passe-t-il en cas de retard un matin ? Ai-je une amplitude horaire pour arriver le matin ? Est-ce moi qui décide de mes horaires ou est-ce que je m’organise en fonction du rythme de mon équipe ? Ai-je des horaires rigides ou puis-je adapter mes horaires en fonction de la charge de travail ? Parce que je suis arrivé plus tôt, ai-je le droit de partir plus tôt ? Il y a-t-il une urgence qui nécessite que je parte un peu plus tard ? Dois-je demander à mon manager si j’ai besoin de moduler mes horaires ? Que se passe-t-il si j’arrive souvent en retard le matin, en réunion, en rendez-vous client ?
Il peut y avoir aussi dans l'esprit d'un jeune qui arrive en entreprise une crainte de se faire “exploiter”, d'avoir à faire des heures supplémentaires, de devoir tout accepter pour un meilleur rendement de l'entreprise.
Les horaires font partie de la culture d'une entreprise ; ils varient beaucoup d'une entreprise à l'autre même si elles sont du même secteur d’activité, de la même taille, de la même région. Les horaires sont liés à l'identité d'une entreprise, à son histoire, à ses clients, à ses dirigeants et aux principes managériaux. Ici il faut s’atteler à la tâche tôt, ne pas traîner dès le matin, tout le monde est là à 8 heures sans exception, et on est opérationnel pour les clients dès 9h. Ailleurs, chacun gère ses horaires lui-même, rien n'est contrôlé, il faut juste que le travail soit fait. Certaines entreprises sont plus « cool », plus souples pour les horaires mais ce seront peut-être les premières à demander d’être plus disponible les jours où il y a un coup de collier à donner.
Donc, l’idéal pour s’adapter est de se renseigner avant d’entrer dans l’entreprise sur son rythme de travail, sur les horaires pour savoir si ce mode de fonctionnement est compatible avec le sien car il sera nécessaire de s’y adapter. De la même manière, si vous arrivez chez votre belle famille, et qu'elle a l’habitude de déjeuner vers midi, vous ne pourrez pas imposer votre habitude de déjeuner à l’heure espagnole. Le mieux est de s'adapter. Il est donc important d’observer le rythme des collègues, de demander des informations et des explications à son manager sur ce point pour que les règles soient claires dès le départ.
Le respect des horaires, c'est le respect des autres. Même si votre travail est passionnant, les horaires peuvent faire partie des contraintes et des efforts que vous devrez fournir car vous ne travaillez plus seul. On respectera davantage un salarié qui comprend et respecte lui-même les règles communes et établies de l’entreprise.
Une question peut quand même se poser : si je fais les heures demandées, puis-je décaler mes heures de travail ? Si tout le monde arrive à 8h30 puis-je arriver à 9h30 puisque je travaillerai une heure plus tard le soir ? En fait il s'agit de savoir si ce décalage sera compris par l'équipe. Si un client appelle quand le jeune salarié n’est pas là, c’est un collègue qui devra répondre à sa place. Arriver plus tard peut avoir une incidence sur le travail d’autres personnes. Des projets peuvent ainsi être bouleversés. Pas question non plus d'affirmer : “puisque je suis arrivé plus tôt je pars plus tôt”. Il est important dès le début de caler son rythme de travail sur celui des collaborateurs de son équipe.
D’autre part, un nouveau collaborateur qui réclame l'application de ses propres horaires, c’est plutôt mal vu... il serait malvenu d'exiger de partir à 17h30 parce que c'est l'horaire idéal pour le cours de zumba avec les copines. Il serait tout aussi puéril de coller un post-it sur son propre ordinateur pour bien préciser qu’il faut partir à 17h31. On n'est plus à l'école ; il n'y a pas de sonnerie.
Du côté des dirigeants d'entreprise, les horaires sont aussi un sujet de réflexion. Car le respect des contraintes des employés (familles, loisirs...) favorise le bien-être et l'efficacité du travail. Les horaires plus flexibles deviennent également un argument de différenciation pour attirer de jeunes collaborateurs avec une promesse de davantage d’autonomie, de souplesse, de liberté... Bien sûr il peut y avoir des cas excessifs mais c'est quand même l'intérêt d'une entreprise de conserver ses salariés, de leur proposer un travail intéressant et de ne pas ignorer les attentes de ses collaborateurs.
En entreprise, le mode de fonctionnement n’est plus comme à l’école. Il y a des périodes de surcharge de travail. On peut demander aux salariés une certaine flexibilité et une certaine souplesse. Cette semaine on doit livrer une grosse commande exceptionnelle chez un client grand compte, tout le monde met la main à la pâte et on termine ensemble un peu plus tard. L’équipe ne peut pas s’apercevoir pendant ces moments que vous n’êtes plus là et que vous êtes parti(e) en douce parce qu’il est quand même 17h36 ! En cas de surcharge de travail, pas question de laisser l'équipe. Certes, il y a une règlementation sur les horaires mais il y a aussi la réalité de l’entreprise avec ses moments de «rush». Le manager doit savoir qu’il peut compter sur son salarié pour avoir une souplesse en cas de rush ou d’impératif client.
S’investir davantage, c’est aussi accepter de travailler un peu plus pour progresser. On ne peut pas s’améliorer et évoluer en ne faisant que le minimum et en refusant des efforts supplémentaires. Ce n’est pas compatible. Il est particulièrement important de ne pas rechigner à la tâche pendant une période d’intégration, de pouvoir montrer une capacité d’effort. La période d'essai est une période de rodage où tout prend plus de temps. Donner de soi en dépassant ses horaires est souvent nécessaire pendant cette période.
Le point de vue et le comportement d'un salarié sur les horaires auront un impact sur sa réputation et son image au sein de l’entreprise. S'il arrive régulièrement en retard, il va devenir rapidement source de stress pour l'entourage ; cela pourra générer des jalousies, des incompréhensions ; il passera pour quelqu’un irrespectueux, d’impoli qui manque de considération pour son entourage. Personne n’aime attendre quelqu’un pour commencer une réunion. Les questions vont vite se poser : peut-on vraiment faire confiance à quelqu’un qui arrive systématiquement en retard ? S’il manque de rigueur sur ce point, qu’en sera-t-il pour le reste ? est-il suffisamment organisé ? est-il suffisamment motivé ? Le risque c'est de provoquer des interrogations et des suspicions qui terniront inutilement l'image du jeune. Être toujours ponctuel, c’est être en phase avec son équipe, c’est un bon moyen de gagner rapidement des points et de montrer qu'on est fiable et adaptable. Et si on s’aperçoit qu’on peut vous faire confiance sur ce point en interne, c’est rassurant, on sait qu’il en sera de même avec les clients en externe.
Pas question pour autant de faire des heures pour faire des heures, de travailler souvent trop tard le soir. Car alors d'autres suspicions pourront naitre : « il est débordé parce qu'il ne sait pas s'organiser » ou « il travaille lentement ». Rester jusqu’à 21heures au bureau peut faire passer pour une personne qui gère mal son temps. Il serait tout aussi vain de faire des heures sup' pour se faire bien voir. Cette tactique marche rarement ! Pas question non plus d'être prêt à tout : ce n’est pas tant le nombre d'heures passées au travail qui importe que les résultats obtenus. Parfois pour obtenir des bons résultats, il n'y a pas forcément besoin de beaucoup travailler. Peut être enfin que votre charge de travail est réellement trop importante et n’a pas été bien évaluée par votre manager, ça arrive. Si la charge de travail ne désemplie pas et que vous terminez trop tard tous les soirs, un point avec votre manager semblera nécessaire.
Dans tous les cas, il est utile d'observer les horaires des collègues et la façon dont ils s'organisent. Parfois même, on pourra tenter de prendre le recul nécessaire avec une tierce personne qui a de l'expérience.
La compréhension des codes de votre entreprise par rapport aux horaires est finalement une bonne opportunité de montrer son appartenance à l’entreprise, son esprit d’équipe et de servir son image en interne pendant sa période d’intégration… alors pourquoi s’en priver ?